Régime des petites indemnités et carte artiste : l’activité de modèle vivant reconnue comme activité artistique par la justice. (15 avril 2020)
En 2005, le législateur belge a créé le « régime des petites indemnité » (en abrégé, le « RPI ») afin de permettre à un artiste – professionnel ou non – de fournir des prestations artistiques à titre occasionnel sans que ces prestations ne doivent être déclarées à la sécurité sociale et sans qu’aucune cotisation ne soit due sur les indemnités perçues.
Afin de bénéficier de ce régime, l’artiste/modèle doit notamment obtenir la « carte artiste » auprès de la Commission artiste, qui est un organe établi au sein de l’ETAT BELGE (Service public fédéral Sécurité social). Pour ce faire, il doit démontrer que l’activité qu’il exerce est bien une prestation artistique. Au sens du RPI, une prestation artistique se définit comme « la création et/ou l’exécution ou l’interprétation d’œuvres artistiques dans les secteurs de l’audiovisuel et des arts plastiques, de la musique, de la littérature, du spectacle, du théâtre et de la chorégraphie » (article 17sexies de l’arrêté royal du 28 novembre 1969 pris en exécution de la loi du 27 juin 1969 révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs).
Ces dernières années, un débat est né sur la question de savoir si l’activité de modèle-vivant pouvait être considérée comme une prestation artistique et si, par conséquent, celles et ceux qui la pratiquent pouvaient obtenir la « carte artiste » et bénéficier du RPI.
Dans plusieurs dossiers, la Commission artiste a refusé de délivrer la carte artiste à des modèles vivants, estimant que leur activité de modelât ne relevait d’aucune création et/ou d’exécution ou d’interprétation d’une œuvre artistique et que les éléments de créativité, d’unicité et d’originalité n’y prévalaient pas.
Saisi de la question par un modèle-vivant de CroquezNous contestant une décision de refus de la Commission, le Tribunal du travail francophone de Bruxelles a invalidé la position de la Commission artiste, estimant qu’il existait manifestement, dans le travail du demandeur, une approche créative et originale et que ce travail était une prestation artistique au sens de la réglementation.
Le Tribunal a par ailleurs souligné que le fait pour un modèle de mettre son art au service d’autres artistes et de contribuer à la réalisation d’autres œuvres artistiques n’enlevait rien à la nature artistique de son activité. Tout en rappelant que, par le passé, la Commission artiste avait elle-même, à plusieurs reprises, reconnu que l’activité de modèle-vivant était une prestation artistique, le Tribunal conclut son jugement en condamnant l’ETAT BELGE à délivrer au demandeur la « carte artiste ». Il est à noter que cette décision a été rendue en l’absence d’un représentant de l’ETAT BELGE, et n’est pas encore définitive.
Elle constitue toutefois une belle victoire pour les modèles-vivants souhaitant bénéficier du régime des petites indemnités, et, plus largement, pour la profession en quête d’un statut à part entière.